L'apogée et le déclin

L'Apogée de la Vigne à Sainte-Foy-lès-Lyon
 
Les années 1820 à 1840 sont pour Sainte-Foy-lès-Lyon celles de la gloire. Le vignoble occupe environ 320 hectares et la production annuelle se situe vraisemblablement, à raison de 25 hectolitres à l’hectare, autour de 8 000 hectolitres.

Il est probable qu’à la suite des travaux de Rey Monléan le cépage Gamay noir à jus blanc soit généralisé sur l’ensemble du vignoble de la commune.

Les témoignages de l’époque sont unanimes pour dire que le vin de la commune est un des meilleurs, ce qui n’est pas nouveau car dans les « Affiches de Lyon » de 1757 on pouvait lire une annonce sur le « vin vieux des balmes de Sainte-Foy-lès-Lyon à 12 sols la bouteille »

Dans ses ‘’ Mémoires d’outre tombe ‘’ Chateaubriand et son épouse, de passage à Lyon en 1804 rendent visite à Joseph Antoine Saget, Maire de Sainte-Foy-lès-Lyon de 1804 à 1814, qui est propriétaire de deux domaines situés aux actuels N° 42 et 72 du chemin de Fontanières.

Il écrit « Ce Monsieur Saget demeurait sur le coteau de Sainte-Foy dans la région du bon vin …. De jolies paysannes servaient à table, elles versaient un excellent vin renfermé dans des dames-jeannes de la grandeur de 3 bouteilles » …

En 1818 dans un rapport de la Société Royale d’Agriculture Rey Monléan précise qu’à Sainte-Foy-lès-Lyon 4/5 des récoltes se font en vin dont les meilleurs, quand ils sont âgés de dix ans, rivalisent avec les premiers crus de Bourgogne et de Bordeaux. On les tire d’un « canton » nommé « Balme » qui est caillouteux, exposé au Levant et abrité du vent.

Rey Monléan observe que la qualité des vins varie selon qu’ »ils sortent des vignobles des propriétaires aisés et qui sont tous d’une qualité supérieure ou qu’ils sont produits par les simples vignerons plus attaché à la quantité.

Dans son « Voyages pittoresque et historique à Lyon et aux environs » M.F.M Fortis écrit en 1821 : « Le coteau de Sainte-Foy-lès-Lyon possède un des plus beaux et des plus riches vignobles de France. Son vin est un des plus spiritueux du département du Rhône. On peut le conserver quinze à vingt ans et même plus longtemps… Dans les années de bonnes maturité comme 1811 – 1815 – 1818 – 1819 il atteint 12° …Ce vin porte avec lui un bouquet qui le distingue. Il est recherché pour sa qualité spiritueuse et son goût moelleux qui lui assigne un rang entre le Côte du Rôtie et le Bordeaux, sa limpidité approche de celle du Bourgogne. Les gastronomes du pays classent les vins de Sainte-Foy-lès-Lyon en plusieurs qualités d’après leur exposition … Les meilleurs sont ceux du terroir des Balmes, de Chassaignes, Monray ou des vignes entre le Levant et le Midi dont la position « pentive » favorise la maturité du raisin ».

Dans les Archives Historiques et Statistiques du Département du Rhône de 1825 on peut lire : « Sainte-Foy est une grande paroisse, très populeuse (1 700 âmes), dans l’été ce nombre s’élève à 2 000, et très fréquentée par la classe aisée des lyonnais.

La proximité de la ville, l’air pur qu’on y respire sur un sol dessiné en amphithéâtre et qu’éclairent les premiers rayons du soleil, la beauté du site, la saveur des fruits dont ce village abonde, la délicatesse de son vin (le vin de Sainte-Foy, surtout celui que l’on récolte dans les vignes au Levant et au Midi est très recherché, il est long à se faire, mais lorsqu’il a acquis sept à huit ans, on ne peut en boire de plus délicat, de plus limpide et d’un goût plus agréable) l’excellent laitage qu’on y trouve (on en fait ce qu’on appelle des recuites, sortes de mets recherchés à Lyon, celles de Sainte-Foy y sont les plus estimées), les agréments en tous genres que l’on s’y procure, sont autant de causes qui portent le bourgeois, les gens d’affaire, les négociants à acheter ou à louer de jolies habitations sur ce lieu favorisé, pour aller, les dimanches et fêtes dans la belle saison, oublier dans d’innocents plaisirs, les soucis, les inquiétudes et les travaux d’une vie agitée….. ».

Dans l’album du Lyonnais de 1843, Barnabé écrit « les vins de Sainte-Foy ! Ils avaient jadis une grande réputation, ils faisaient très bonne figure sur les meilleurs tables, à côté des Côtes Rôties qu’ils rappellent par leur bouquet très aromatisé et un feu intérieur aujourd’hui trop dédaigné… »

Dans son traité sur les vins de France P. Batilliat note en 1846 que la partie Sud du département produit des vins qui ne ressemblent en rien à ceux des cantons limitrophes de Saône et Loire. Ils sont plus spiritueux, plus colorés et ont un parfum qui diffère de celui des autres, aussi sont-ils plus tardivement « potables ». Il suffit d’ailleurs de les nommer pour que l’on se rappelle leur réputation. Il s’agit des vins des Côtes Rôties, Verenay, Sainte-Foy, et en vin blanc ceux de Condrieu.
Enfin E. de Rolland et D. Clouzet, dans le dictionnaire illustré des Communes du Rhône de 1902 disent « Le vin produit à Sainte-Foy-lès-Lyon est de bonne qualité. Sur quelques points il est excellent et de longue garde ».
Plus près de nous, et sans chercher des témoignages lointains, on sait qu’Antonin Guinand, propriétaire de Bramafam a fourni le célèbre restaurant de la mère Guy à La Mulatière.

Est-ce le moment de parler du vin des communes voisines de Sainte-Foy ?
Millery avec son coteau de la Gallée a toujours bonne réputation ainsi que St Genis Laval avec son coteau des Barolles. Par contre les gens de Sainte-Foy auraient dit du vin d’Oullins qu’il n’est bon « qu’à laver les pieds des chevaux ». Celui de Brindas est « fameux à rebours ». On en dit tout le mal possible dans les presbytères et les séminaires. C’est une mauvaise réputation usurpée, dit Petrus Sambardier. Les vignes de Brindas appartiennent à l’Archevêque mais avant d’arriver à la table des séminaristes ce vin a fait une bonne station à la fontaine, d’où la locution « mouillé comme le vin de Brindas » qui court dans le monde ecclésiastique.

La fin du Vignoble

A partir de 1910, le vignoble régresse considérablement. Les déclarations moyennes de récolte à partir de 1900 sont les suivantes:

Sainte-Foy-lès-Lyon

      Année                           Nombre de déclarations                 Superficie en hectares               Production en hectolitres
       1900                                                   165                                                         4 000
      1910                                                    160                                                           1 500
      1920                                                    60                                                              40                                                   1 500
      1930                                                   135                                                             35                                                    1 200
      1940                                                   125                                                             30                                                    1 000
      1950                                                   105                                                             25                                                       500
      1960                                                    50                                                              10                                                       400
      1970                                                    22                                                               5                                                        200
      1973                                                     12

On assiste cependant à un phénomène assez curieux entre les années 1920 et 1940. Bien que les superficies cultivées soient en forte diminution, le nombre des déclarations augmente car des habitants qui ne sont plus producteurs achètent du raisin du Midi pour faire eux-mêmes leur vin. De plus, des ouvriers du PLM bénéficiant d’un transport à prix avantageux achètent du raisin en cageots à la gare d’Oullins et font aussi leur vin.

En 1942, le syndic des vignerons suggère que l’on demande un classement en appellation d’origine car certains producteurs tels que Bidal, Boirivant, Buraud, Fenet, Moulin et les Missions d’Océanie, fournissent un très bon vin apprécié des cafetiers du pays.

Mais le déclin du vignoble est irréversible. Entre 1950 et 1970, beaucoup de producteurs arrachent définitivement leur vigne. On peut citer, entre autres, Boirivant, Delavis, Desgras, Ménichon, les Pères Maristes, Vivier.

Les 12 dernières déclarations figurant aux archives communales datent de 1973 et émanent de Berrizi, Chapuis, Cuny, Genevois, Giroud, Millot, Moyroud, Paday, Revel, Robert, Sauvignet, Vincent. Il s’agit de productions réservées à la consommation familiale.

Au début de 1995, seul Bernard Paday, notre dernier vigneron, cultivait un carré d’hybrides 54/55 au voisinage de l’Hôpital et vinifiait dans la cave de la ferme Millot, rue Sainte-Marguerite, qui, curieusement, appartenait selon le plan géométral de 1784 à un autre Bernard Paday, son ancêtre.

Que reste-t-il comme souvenirs visibles du vignoble ?

Quelques pressoirs, une dizaine, quelques cuves, beaucoup de tonneaux, des bennes et benots, de très belles « fontaines » en cuivre et, en ce qui concerne les bâtiments, un grand nombre de belles caves voûtées dont certaines de grandes dimensions et des escaliers en pierre portant l’anneau en fer et les encoches dans lesquelles se plaçait la corde qui servait à monter et descendre les fûts. C’est peu de choses par rapport au passé viticole glorieux de la commune.

Les Côteaux du Lyonnais

A partir de 1930, quelques courageux vignerons, sous la conduite d’Honoré Caillat, décident d’améliorer la qualité des vins locaux, de supprimer les hybrides, de mettre au point de nouvelles méthodes de vinification. Des réunions périodiques ont lieu aux 7 Chemins.

En 1948, a lieu à Millery la première manifestation des vins des coteaux du Lyonnais. Ils ne portent pas encore d’appellation. Le vigneron Moyroud de Sainte-Foy y participe. Un deuxième concours a lieu en 1952 à Fleurieux sur l’Arbresle.

Le titre de VDQS est accordé le 10 Mars 1952, puis l’AOC (appellation d’origine contrôlée), le 9 Mai 1984.

Sainte-Foy se désintéresse de ces décisions car sa production et sa consommation sont essentiellement familiales.

Les coteaux du Lyonnais répondant à l’appellation contrôlée couvrent aujourd’hui 280 hectares répartis sur 50 communes appartenant aux cantons de l’Arbresle, Saint-Genis Laval, Givors, Mornant, Vaugneray et Limonest.

Les seuls cépages admis sont le Gamay noir à jus blanc pour le vin rouge et le Chardonnay et l’Aligoté pour le vin blanc. Les porte-greffes sont variables selon les terrains. La production moyenne est de 18 000 hectolitres par an, dont 6 à 7 % de blanc et 1% de rosé. On trouve une grande variété de vins, primeurs ou de garde. Les bouteilles ne portent pas le nom de la commune. En ce qui concerne la qualité, le vin de Millery 1993 était dit « gouleyant, équilibré, harmonieux, agréable, réveillant les sens ». Pour une certaine cuvée de 1994, on parle de « sa robe cerise, son nez vif de petits fruits acidulés, sa souplesse, sa fraîcheur et sa franchise ». Il faut le boire plutôt frais à 12°.

Et si vous voulez tout savoir, peut-être aurez-vous la chance de rencontrer Paul Caillat de Millery. Il est la mémoire des Coteaux du Lyonnais.

Les principales fêtes à retenir sont :

- A Taluyers, la Foire du Vin nouveau, le samedi qui suit la libération des primeurs qui est le 3ème jeudi de Novembre.
- A Millery, la Journée des Vins du Lyonnais, le deuxième samedi de Décembre.
- A Saint-Laurent d’Agny, la fête de la Saint-Vincent, le samedi le plus proche du 21 Janvier.


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